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Sous la langue (Nicole Brossard)
Le corps salive, rien pourtant n'est prévu, ni l'abondance des touchers, ni la lenteur furtive, la fureur exacte des bouches. Rien n'est prévu pourtant c'est à la hauteur des yeux que le corps d'abord touche à tout sans prévoir la peau nue, Aussi bien le dire, sans prévoir la douceur de la peau qui sera nue avant même que la bouche signale l'état du monde.
Rien ne suggère ici qu'au moindre toucher le regard déjà défaille à vouloir déjà prévoir un tel rapprochement. Rien n'est prévu sinon que la respiration, la répétition des sons entre les chairs. Fricatelle ruisselle essentielle aime-t-elle dans le touche-à-tout qui arrondit les seins la rondeur douce des bouches ou l'effet qui la déshabille ? Rien n'est prévu pourtant au bout du corps la peau fera image du corps car il n'y a rien sans image au bout du corps ce sont les images qui foudroient l'état du monde.On ne peut pas prévoir pencher si soudainement vers un visage et vouloir lécher le corps entier de l'âme jusqu'à ce que le regard étincelle de toutes les fureurs et les abandons.
On ne peut pas prévoir l'emportement du corps dans l'infini des courbes, des sursauts, chaque fois que le corps se soulève on ne voit pas l'image, la main qui touche la nuque, la langue qui écarte les poils, les genoux qui tremblent, les bras qui par tant de désir entourent le corps comme un univers. On ne voit que le désir.
On ne peut pas prévoir l'image, les fous rires, les cris et les larmes. L'image est tremblante, muette et polyphonique. Fricatelle ruisselle essentielle aime-t-elle le long de son corps la morsure, le bruit des vagues, aime-t-elle l'état du monde dans la flambée des chairs pendant que les secondes s'écoulent cyprine, lutines, marines.
On ne peut pas prévoir si les mots qui l'excitent sont vulgaires, anciens ou étrangers ou si c'est toute la phrase qui l'attire et qui avive en elle le désir comme un flair de l'étreinte, une manière de sentir son corps prêt à tout, sans limite. Rien n'est prévu pourtant la bouche du corps à corps excitée par les mots trouve d'instinct l'image qui excite.Rien n'est prévu car nous ne savons pas ce qui arrive à l'image de l'état du monde lorsque la patience des bouches dénude l'être. On ne peut pas prévoir parmi les vagues, la déferlante, la fraction de seconde qui fera image dans la narration des corps tournoyant à la vitesse de l'image.
On ne peut pas prévoir comment la langue s'enroulera autour du clitoris pour soulever le corps et le déplacer cellule par cellule dans l'irréel.Nicole Brossard
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Commentaires
2CoquineLundi 1er Novembre 2010 à 15:13Il n'y a pourtant
rien à envier... juste des désirs inassouvis, des rêves envolés, des partages solitaires, une âme seule et qui, pourtant, ne perd pas espoir de vivre à nouveau l'Amour, le don de soi, la douceur, la tendresse, l'émotion, la sensualité...Ce texte
décris magnifiquement bien le délice du cunnilingus, qu'il soit hétéro ou lesbien (a ce niveau il ne doit pas y avoir de différence!) Il est triste de lire votre réponse ci-dessus, Coquine...Triste est la solitude et l'insatisfaction, mais l'espoir vous soutient et je vous souhaite de bientôt retrouver ce bonheur de l'amour partagé, plaisirs des corps comme des coeurs!4CoquineJeudi 4 Novembre 2010 à 19:36Si, il y a
une énorme différence... c'est incomparable même... Quant à ma solitude, elle est triste oui, comme mon âme et mes espoirs qui s'effritent, s'amenuisent, au fil des jours qui passent... Merci pour vos souhaits Dionys !5toienmoiSamedi 6 Novembre 2010 à 12:54merci
chère coquine merci de tes attentions sur notre blog le jour viendra et O combien je sais que rien n'est simple je passais te faire signe cordialement et plein de bises
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Si je vous dit que je vous envie ... ?